Viande bovine Pas d’avenir sans changement de modèle
La conclusion du congrès de la Fédération nationale bovine (FNB) est claire : le modèle actuel de la filière de la viande bovine conduit les éleveurs droit dans le mur. La loi sur l’agriculture et l’alimentation offre des outils inédits pour initier le changement, mais certains acteurs de l’aval semblent peu enclins à modifier leurs habitudes.
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« Cela fait quarante ans que pour maintenir le pouvoir d’achat des consommateurs, on a tapé sur le pouvoir d’achat des producteurs, a résumé Christiane Lambert lors du congrès de la FNB, le 6 février à Mende, en Lozère. Depuis 3-4 ans, nous alertons sur le fait que les choses ne peuvent plus durer, que même les producteurs les plus performants ne couvrent plus leurs coûts de production. » Pour la présidente de la FNSEA, le vrai chantier des États-généraux de l’agriculture (EGA) a été de démontrer que la destruction de valeur issue de la course au prix bas menait toute la filière dans le mur.
De nouveaux outils
Objectifs de contractualisation, indicateurs de coûts de production, augmentation du pouvoir des organisations de producteurs (règlement Omnibus), ordonnance relative au relèvement du seuil de revente à perte et à l’encadrement des promotions, ordonnance relative à l’interdiction de cession à un prix abusivement bas (en discussion)… Voici autant d’outils nouveaux qui pourraient faire évoluer la répartition de la valeur ajoutée au sein de la filière de la viande vers plus d’équité.
Christiane Lambert s’est également félicitée de « la victoire importante » que représente l’article 44 de la loi sur l’agriculture et l’alimentation (interdiction d’importer des produits animaux et végétaux qui ne respectent pas les mêmes conditions de production qu’en France), ainsi que de la reconduction de l’expérimentation sur l’étiquetage de l’origine des viandes transformées.
« J’ai beaucoup d’espoir, nous avons un plan de filière où tout est écrit, sur lequel tout le monde était d’accord, a déclaré Patrice Faucon, le secrétaire général adjoint de la FNB. Qu’on le mette en marche maintenant ! »
« À présent que nous avons ces outils, il nous faut les artisans, et c’est là que nous sommes attendus », a souligné Christiane Lambert, invitant chacun à prendre ses responsabilités.
Contraintes et sanctions
« Avec le fonctionnement actuel de l’interprofession et l’attitude de certains de ses membres nous ne parviendrons pas à atteindre nos objectifs des EGA », a averti Bruno Dufayet, le président de la FNB. Il a demandé au ministre de l’Agriculture de « fixer à l’interprofession une obligation de résultat », d’exercer « un contrôle permanent » et de « faire l’évaluation des avancées concrètes ».
« Il faudra prévoir des contraintes et des sanctions dans le cas où les choses n’avanceraient pas correctement, a-t-il prévenu. Nous vous demandons donc, Monsieur le Ministre, de conditionner tout soutien public aux acteurs de la filière à la mise en œuvre concrète de ce plan. »
« L’interprofession ne fait pas tout »
Les intervenants des tables-rondes organisées lors de ce congrès de la FNB ont, à plusieurs reprises, convoqué des démarches à succès, telles que l’AOP Comté ou la renaissance du territoire de l’Aubrac grâce à la valorisation de la race aubrac et la réussite de la coopérative fromagère Jeune Montagne.
André Valadier, l’un des fondateurs de la coopérative Jeune Montagne, a partagé son expérience : « Nous avons pris conscience que chez nous, ce n’était pas le poids des animaux, ou le volume de lait produit par vache qui apportaient une plus-value. Nous nous sommes tournés vers des plus-values immatérielles : le sensoriel, le plus important, le culturel, l’émotionnel et l’esthétique, à laquelle le territoire contribue. Il faut parfois prendre le risque de déplaire pour être utile. Par exemple, quand j’ai annoncé qu’il fallait supprimer l’ensilage des rations, après en avoir fait la promotion pendant 25 ans, ce n’était pas simple, mais c’était décisif pour rester en lait cru. »
« L’interprofession peut aider mais ne fait pas tout, a rappelé Patrice Faucon. Il faut s’inspirer des réussites. Éleveur & Engagé fonctionne, alors qu’on nous prédisait l’inverse. Pourquoi ne pourrions-nous pas décliner le cas de l’aubrac partout en France ? Il y a des choses qui bougent. »
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